[Exclusivité Édito] Pourquoi vous plaignez-vous ? Tout va très bien Madame la Marquise !

Budget, pas budget ; censure, pas censure. Qu’importe, puisque, de guerre lasse, « vous êtes heureux, épanouis dans votre travail, enjoués d’une réforme de l’enseignement professionnel que vous réclamiez depuis tant d’années ! ». C’est ce que le cabinet d’Élisabeth Borne a pu dire en audience au SNETAA. Alors : soit les bras m’en tombent, soit, tout simplement, nous ne consultons pas les mêmes personnels ! Allez savoir… Toujours est-il que la Conseillère à l’enseignement professionnel, bien que rompue au dialogue social et décidée à mettre du liant, n’a pas pu s’empêcher de dire tout le bien que pensaient les PLP, les chefs d’établissement, les IEN de la réforme Grandjean. 

Plutôt que de lancer des anathèmes et de confronter réalité des PLP, CPE et tous les personnels des LP, SEP, SEGPA, EREA versus « bulle Metaverse », on va continuer à porter la voix de ceux, ultra majoritaires, qui ne cessent de hurler le contraire. Il n’y a pas pire sourd que celui qui ne veut pas entendre. Et je ne parle même pas de l’expert, certain de sa toute-puissance, qui avait le toupet de nous prendre pour de fieffés c… Ah, ce peuple de salariés, de fonctionnaires qui ne comprennent rien à rien ! Manquerait plus que le peuple vienne à voter, « faudrait fissa en changer » !

Sans vouloir plagier l’excellent communiqué d’un syndicat de l’Éducation nationale à l’annonce de la nomination de l’ancienne Première ministre : le SNETAA ne sait plus quoi dire ! C’est comme l’affaire des 4000 postes d’abord supprimés puis remis au budget de l’État. Un pas en avant, un pas en arrière, ça nous ramène à la même situation. L’existant ne change pas quand je croyais que la France s’enfonçait dans PISA, que les enseignants se plaignaient de perdre sens en leur métier (si ce n’est leur latin dans le gloubi-boulga des réformes) et que les salaires des profs étaient toujours aussi médiocres, si ce n’est indigents. D’autant que les 4 000 postes vont être récupérés de facto par le nombre estimé de places vacantes à la sortie des concours : 3 600 lauréats manquants. Bah tiens ! Bref, les politiques font comme les technocrates qui font main basse sur le pouvoir : on ne sait parler que de flux, de quantité quand la vraie question est qualitative : de quels enseignants avons-nous besoin ? Où ? Pour quoi faire ? Avec quelle pédagogie ? Quelle carrière ? À quel salaire ? Pour réussir quoi ? 

Ouh làlà làlà… c’est quand même plus simple de sortir un leurre de suppression de postes, postes qu’on remettra dans le pot commun pour faire croire à une victoire mais qu’on n’aura quand même pas car le métier n’attire les excellents candidats que peu. Et il y en a qui crient victoire ? Pour moi, là, c’est trop trop fort, carrément ! Ce n’est pas de sur-place qu’il s’agit, c’est encourager la dégringolade du niveau des élèves quand « ceux qui sont bien nés » auront toujours les codes et les réseaux pour échapper aux destinées médiocres. L’École n’a jamais été aussi inégalitaire ; elle perd sa force émancipatrice. C’est tout le pays qui en subira les conséquences. Sauf dans le Metaverse, naturellement !

Alors les lycées professionnels, « puisqu’on vous dit que vous êtes heu-reux  » !

Je ne sais pas si l’avenir sera prometteur. Ce que je sais, c’est que le présent est si affligeant que c’est à nous de nous organiser pour remporter le rapport de force ! Seule l’action dans le combat pourra faire entendre nos voix et voir ce que l’on voit, c’est-à-dire faire revenir à la réalité. Le SNETAA intensifie ses combats pour faire aboutir nos revendications des collègues de terrain. 

Mais puisque tout va bien… 

Alors, heureux ?

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