Après 9 mois à combattre le discours stigmatisant et dévalorisant de la ministre déléguée à l’Enseignement et à la Formation Professionnels sur les Professeurs de Lycée Professionnel ainsi que sur nos établissements, le Président de la République vient de faire ses annonces d’une réforme des lycées professionnels avec un budget dédié de 1 milliard d’€ tous les ans.
Les objectifs affichés, « zéro décrochage », « 100% d’insertion en enseignement supérieur ou en emploi », « lutte contre l’orientation subie », « découverte des métiers au collège » n’ont rien de nouveau car ce sont ceux de l’ensemble des professeurs de lycée professionnel (PLP) qui travaillent au service des élèves dans les lycées professionnels ; en revanche, la mise en oeuvre des modalités concrètes pour les atteindre nous inquiètent, pour le moins.
Le SNETAA, dans le respect de ses adhérents, des PLP, des jeunes qui choisissent la voie professionnelle pour trouver leur place dans la vie professionnelle mais aussi dans leur vie d’adulte et de citoyen, ne laisssera passer aucune mesure susceptible de porter atteinte au rôle émancipateur de la voie professionnelle initiale, publique et laïque sous statut scolaire.
Le SNETAA s’opposera à toute carte des formations totalement adéquationiste qui limiterait l’éventail de formations pour les jeunes. C’est oublier la présence des CREFOP, instances où siègent État, région, syndicats de salariés et organisations patronales qui proposent chaque année d’adapter la carte des formations. C’est oublier le rôle du LP de former le jeune à un métier, pas à un emploi.
Le « Bureau des entreprises » annoncé dans chaque lycée professionnel, correspond exactement à l’actuelle mission des DDFPT (ex-chefs des travaux) qui sont en lien direct avec les entreprises, gèrent les stages au quotidien ainsi que la fidélisation des lieux de stage ; ils recrutent également les professionnels qui interviennent dans les jurys de diplômes (CAP, BP, Bac Pro, BTS et licence Pro). Quid de ces professeurs-DDFPT ?
Si l’entreprise est un acteur privilégié du lycée professionnel, elle n’est qu’un support pédagogique au choix des référentiels et des professeurs. Elle ne doit être en rien prescriptrice de l’École quand elle décide déjà, quasiment seules, des diplômes dans les CPC. Depuis la loi Pénicaud (liberté pour choisir son avenir professionnel), les professeurs de lycée professionnel (PLP) ont été chassés de ces instances, alors qu’ils sont les experts de la formation et de l’ingénierie de contenus de formation. Comment oublier dans une réforme de la voie professionnelle la place des PLP dans la construction des diplômes ?
Le SNETAA défend le statut des PLP, professeur fonctionnaire d’État de catégorie A et leur formation. Être professeur est un métier ! C’est pour cela que nous nous opposons aux « professeurs associés » qui viendraient concurrencer les PLP et mettre en péril leur statut.
Sur la gratification, le SNETAA porte ce mandat depuis 2001. Il permet de valoriser des élèves qui ont souvent été orientés en LP car en échec scolaire ; c’est leur permettre une meilleure estime de soi.
D’une gratification financière, nous aurions préféré que les entreprises soient encouragées à reconnaitre l’investissement des élèves pendant les stages tandis que l’État pouvait revaloriser les bourses des jeunes lycéens professionnels qui sont souvent issus des milieux les plus fragiles.
Nous mettons en garde contre la concurrence entre apprentis et élèves gratifiés. La gratification étant « gratuite » pour les entreprises.
Au SNETAA, nous aurions préféré des incitations pour l’accession à la culture ainsi que de discuter sur un statut spécifique du lycéen professionnel. La moitié d’entre eux travaillent en complément de leurs études pour pouvoir subvenir à leurs élémentaires besoins.
Si nous sommes convaincus que l’orientation se prépare au long cours, nous attendons de voir comment les annonces du Président vont être mises en musique au collège. Le SNETAA sera particulièrement attentif à la place centrale donnée aux PLP dans ce dispositif.
Concernant le Pacte – le double des autres professeurs du second degré – les PLP refusent « le travailler plus pour gagner plus ». Les missions énoncées par le Président pour y prétendre correspond aux missions que les PLP exercent déjà : recherche de lieux de stages, information à l’orientation en collège, portes ouvertes des lycées professionnels, participation aux « carrefour des métiers », « forum des métiers », suivi des PFMP prévu dans notre statut, etc. Alors doit-on comprendre que les PLP bénéficieraient-ils tous du « pacte » comme valorisation de notre profession ?
Sur les formations post-bac pro, le SNETAA met en garde : seules les mentions complémentaires (CAP+1 ou BAC+1) sont reconnues au RNCP ainsi que dans les conventions collectives. Nous n’accepterons aucun ersatz de formation d’attentes qui n’aurait pas une finalité diplomante et non-reconnue dans les conventions collectives des branches.
Nous réclamons l’ouverture massive de places en MC ainsi qu’en BTS et Licence Pro pour nos bacheliers professionnels souvent recalés par parcoursup.
L’annonce d’une terminale bac pro en fonction du choix de l’élève à s’orienter directement vers un emploi ou vers l’enseignement supérieur est un leurre : 80 % des bacheliers pro s’inscrivent sur parcoursup pour effectuer des études supérieures ; la réponse de parcoursup n’intervenant qu’en juillet, les élèves ne pourront pas choisir avant cette date. Quant à l’organisation concrète dans les Lycées professionnels, elle semble techniquement impossible.
Il ne s’agit pas de donner « plus de temps d’entreprises aux jeunes » reconnus comme de bons techniciens des métiers mais de « plus d’école et mieux d’école » pour leur donner les bases scolaires minimales pour être aussi un citoyen éclairé. Car en lycée professionnel, on forme d’abord des Hommes et des Femmes, des Citoyens et des Citoyennes tout autant que des futurs travailleurs.
Le SNETAA a mené le combat pour garder l’enseignement professionnel sous statut scolaire, public et laïque au sein de l’Ecole de la République pendant ces 9 derniers mois. Si un discours volontariste peut apaiser, il n’en demeure pas moins que nous restons vigilants contre toutes les formes d’attaques d’une part intégrante de l’École de la République.