Les jours défilent avec son lot d’informations et de contre-informations, de vérités affirmées à l’emporte-pièce des commentateurs et nouveaux experts auto-proclamés ; ils n’ont de cesse de justifier leur cohérence quand, de toute évidence, tout ceci engendre des nausées post-sur-dose.
La communication gouvernementale se fait dans un brouhaha cathodique et chaotique.
Chaque soir, la litanie des chiffres donne le tournis et nous enjoint de nous transmuter en statisticiens de l’INSEE (et bien sûr, si on s’interroge légitiment, c’est parce que on n’a pas bien écouté… bien sur… !). S’ajoutent désormais les cartes avec code couleurs qui, plutôt que de nous éclairer, surchargent nos questionnements voire nos craintes quand ce ne sont pas nos anxiétés. Notre confiance de toute évidence.
Il y a une grande différence entre la « transparence tout azimut» et « l’explication claire d’une décision politique ».
Tous les PLP Lettres – pas qu’eux d’ailleurs – nous rappelons à l’envi l’adage de Boileau qui veut que « ce qui se conçoit clairement, s’énonce clairement ».
Tout cela n’est pas clair !
La fausse-transparence à tout-va n’est qu’une illusion qui n’explique rien. Elle accélère la crise de la démocratie. Ce dont nous avons besoin, c’est de décisions politiques prises en responsabilité c’est-à-dire après consultations des scientifiques bien sûr, mais, surtout, des acteurs de terrain. Pas de celui qui ne pèse que son poids mais bien des acteurs REPRESENTATIFS des Braves Gens (1). Oserai-je dire du peuple ? Quand il ne parvient plus à se sentir représenté… Michel Onfray, dans un entretien du 03 mars dernier, fait la différence entre peuple et populace : « Vous confondez le peuple et la populace… Le peuple fut un mélange de sagesse empirique avec une tradition orale plusieurs fois millénaire et de sagesse républicaine enseignée par l’école publique aux enfants des classes les plus modestes à égalité avec les enfants issus des classes favorisées. La populace, c’est le peuple vidé de cette sagesse empirique, souvent rurale et paysanne, puis vidé de cette sagesse républicaine et rempli de la bouillie libérale fabriquée par l’état maastrichien qui est lui-même un rouage d’un futur État mondial, dont Attali a raconté la nature dans Demain, qui gouvernera le monde ? »(2)
Le Covid-19 ne nous fait pas découvrir une crise de la représentation démocratique (3).
Au SNETAA, nous ne cessons d’assurer notre indépendance à l’égard des partis politiques et de tous groupes de pressions et de faire du syndicalisme. Nos mandats veillent au grain !
Le 1er mai 2020 a été bien singulier. En tant que journée internationale des travailleurs, elle nous oblige encore plus à représenter les travailleurs, à défendre leurs intérêts matériels et moraux et à travailler encore plus avec les organisations syndicales représentatives d’autres pays. Le SNETAA y représente les PLP, les CPE, les professeurs contractuels et tous les personnels de l’enseignement professionnel. Il porte aussi l’enseignement professionnel comme élément constitutif de l’École de la République au service de tous les jeunes.
Il est encore loin le temps du bilan quand nous avons tous la tête dans le guidon. Toutefois je concède que mon avis s’affine : « le monde est devenu fou et tous les fous s’y retrouvent.» !
Ainsi on confond transparence et vérité, précipitation et agilité, pouvoir exécutif et démocratie. On en aurait presque perdu les questions majeures dans une société démocratique à l’heure où – sous couvert du diktat du « principe de précaution », mirage du risque zéro – nos sociétés consuméristes ont éloigné au plus loin de nos vies ce qu’elle en est pourtant consubstantielle, je veux parler de la mort.
Heureusement quelques intellectuels sont montés au créneau pour nous rappeler au sens même de nos vies ; nos ainés se sont révoltés contre « leur confinement » qui confinerait à une incarcération mais, bien sûr, pour leur bien ! Encore une fois.
Au SNETAA, nous avons eu un réflexe éthique contre tous les systèmes de fichage, contre tous les risques liés au tracing, tout ce qui va à l’encontre des libertés individuelles, de nos libertés collectives conquises siècle après siècle par nos pairs, contre toutes les formes de stigmatisation quand un nombre non négligeable de soignants subissaient, au début du confinement, le rejet de certains de leurs voisins, pour ne prendre que cela en exemple.
La peur est aussi un système de gouvernance. C’est vrai pour le pouvoir exécutif mais tout autant d’organisations politiques, associatives ou syndicales alors qu’elles sont très bien intriquées voire impliquées dans cette crise de la représentation.
Le SNETAA-FO poursuit son travail-militant pour être toujours proche de TOUS ses adhérents.
Les discussions nationales se poursuivent sur l’ensemble des dossiers qu’ils soient «corpo», dossiers de fond sur la transformation de la Voie Professionnelle et «dossiers individuels».
Le SNETAA-FO exige toutes les garanties sanitaires pour toute reprise en présentiel et ce, quelle que soit la date définie. Elle est de plus en plus hypothétique. Aujourd’hui le 02 juin pour les LP. Mais demain…. ?
Sur les questions « corpo », il y a toutes les questions RH que nous avons portées : recours des collègues contre leurs mutations inter (et nous n’avons jamais vu un aussi mauvais état des mutations des PLP depuis 20 ans !!!), équivalence CAPPEI pour les PLP de Segpa et Erea, situation et contrats des professeurs contractuels (particulièrement des professeurs en CDD), promotions à la hors-classe et à la classe exceptionnelle, titularisation des professeurs stagiaires, passation des concours de PLP et de CPE. Tant d’autres dossiers aussi.
Sur les dossiers « classe », qu’on qualifie aussi de « pédago », le travail est tout aussi intense : reconnaissance des diplômes au RNCP de France Compétences par exemple. Nous portons notre opposition à l’extension des familles des métiers en classes de secondes Bac pro (nous avons réussi à garder une seconde AGORA hors champ professionnel quand l’établissement le demande : veillons à porter cette revendication auprès des chefs d’établissement pour garder les classes AGORA en dehors de la famille des métiers !). Nous bataillons pour la rentrée de septembre en exigeant l’ouverture en nombre de CAP 3 ans pour permettre à tous les élèves en lourdes difficultés de profiter de temps et d’accompagnement. Le SNETAA exige l’ouverture de places sous statut scolaire pour les nombreux apprentis qui vont être licenciés à la fin du chômage partiel (prévision de 40 000 à 70 000 licenciements d’apprentis de niveaux CAP et Bac Pro). Nous pesons en tant que premier syndicat de l’enseignement professionnel pour faire aboutir nos revendications. C’est aussi forcer les décideurs à abonder tous les LP de dotation horaire globale (DHG).
De la DHG, ce sont des moyens financiers et humains ! De la DHG, ce sont nos emplois de fonctionnaires et de professeurs contractuels !
Sans places élèves, point besoin de professeurs !
Au niveau des académies, les équipes locales portent les dossiers des collègues et assurent les instances « évolution de carrières » (promotions en CAPA), les demandes de mutations (intra), les audiences avec les Recteurs et Rectrices pour exiger des réponses à nos légitimes attentes. Elles interviennent partout pour que, dans ce moment inédit, la voix des adhérents soit entendue « en vérité ».
Je sais que l’Homme est vite conduit à ne pas chercher la vérité mais obtenir des certitudes.
Au SNETAA-FO, nous cherchons la vérité – qui n’est pas hors-sol ou dans un monde des idées, plus ou moins oniriques, non – la vérité se trouve sur le terrain. Concrètement. Je serais presque tenté de parler de « concrêtude » en me moquant de son usage impropre. Voilà pourquoi les PLP, les CPE, tous les personnels doivent avoir voix au chapitre et être entendus.
Le SNETAA-FO pèse de sa représentativité en tant que premier syndicat de l’enseignement professionnel depuis 1948. Son expertise est crédible. Ses adhérents sont sa force.
Nous défendons dossier par dossier, pas à pas, les Professeurs de Lycées Professionnels et tous les personnels de l’enseignement professionnel.
Nous luttons pour de meilleures conditions de travail partout.
Nous continuons à promouvoir d’arrache-pied nos diplômes, notre bel enseignement professionnel initial public et laïque au sein de l’École.
Nous défendons la spécificité de nos enseignements et de nos établissements.
Nous continuons d’être au plus près des élèves et de leurs familles quand tout est fait pour les éloigner de notre modèle républicain qui forme et le travailleur et le citoyen.
Toutes nos pensées vont à toutes les victimes du Covid-19, à leurs proches, à toutes les personnes – jeunes ou vieilles – en solitude subie, à tous les militants qui portent votre voix.
Le combat est notre moyen. Ce n’est pas une fin.
Avec vous, le SNETAA mène toutes les bagarres pour FAIRE ABOUTIR vos revendications ! C’est notre mandat.
Nous gagnerons !
Pascal VIVIER
Secrétaire Général du SNETAA-FO
(1) Braves Gens, A. Tchekhov, ed. Gallimard, Pleiade, 1967
(2) M. Onfray, propos recueillis par E.LEVY, Causeur, 03/03/2020, www.causeur.fr
(3) Le peuple introuvable, histoire de la représentation démocratique, P. Rosanvallon, Gallimard, 2002