Le président de la république fait sa rentrée dans un lycée pro ce 1er septembre à orange (84)
omme tout un chacun, j’ai suivi au travers de la presse – que plus grand monde ne lit par défiance et bouleversement du monde – les atermoiements du gouvernement remanié (accordant des bonus au mépris ou à l’incompétence. Voire aux deux. Notre secteur sait de quoi il parle !). J’ai lu l’interview fleuve du Président de la République dans Le Point et les communiqués divers qui s’en sont suivis. Est-ce que promouvoir une rentrée des classes le 20 août est une provocation ? Je n’en sais rien quand je vois que l’opinion y est plutôt favorable et que les vacances scolaires sont devenues notre dernière planche de salut pour se requinquer alors que notre métier nous rend de plus en plus… chèvre. Je ne saurai jamais me soumettre au diktat d’une pensée voulue unique si ce n’est inique comme je ne saurai jamais accepter qu’on ait pu laisser s’enfoncer à ce point l’École pendant ces trente dernières années. Notre École qui, comme notre système de santé, constituait pourtant un modèle typiquement français, reconnu et envié par le monde entier. La faute à qui?
Ce que je sais sur « une rentrée le 20 août », c’est que c’est une annonce sortie de nulle part comme un lapin crevé du chapeau d’un piètre prestidigitateur. La question des rythmes scolaires a rarement été débattue, jamais travaillée en profondeur avec les premiers directement concernés, les professionnels de l’éducation. Un coup de com de l’Élysée? Une provocation ? Le meilleur article que j’ai pu lire sur la question, sévère, vient de L’Obs ; je ne peux que vous y renvoyer. Le fait que le Président de la République annonce que l’Éducation est du « domaine réservé du Président » est la meilleure nouvelle dans cette rentrée morose. Car, depuis l’arrivée de Gabriel Attal au ministère de l’Éducation nationale, le SNETAA, premier syndicat de l’enseignement professionnel avec une histoire si forte, n’a pas été une seule fois contacté ni par lui ni par son cabinet. Du jamais vu depuis 30 ans ! Enfin, si… Vincent Peillon et Najat Vallaud-Belkacem nous avaient réservé le même accueil avec le bilan qu’on connaît : le statut à 1 607 heures pour les professeurs et un délitement sans pareil de l’enseignement professionnel, public et laïque. Alors heureusement que le SNETAA est encore reçu à l’Élysée. Vous me direz, tous ceux qui suscitent du haut de leur incurie, indifférence, défiance et qui sont responsables de l’état dans lequel nous nous trouvons, sauront rappeler à l’Élysée que le premier syndicat du secteur doit juste se faire envoyer aux pelotes et ranger aux oubliettes de l’histoire. Mais c’est bien négliger la puissance militante du SNETAA, un syndicat d’adhérents – implanté dans tout le pays, y compris puissamment dans les Outre-mer au mieux laissés pour compte – pragmatique, réformiste, portant nos valeurs d’un humanisme universel et défendant un à un les professeurs de lycées professionnels avec ces 20% de professeurs contractuels. Sans compter ses établissements spécifiques qui dispensent encore près de 4 500 diplômes nationaux. Le SNETAA dont ses adhérents, par milliers renouvelés, nous donnent un mandat fort : celui de porter leur voix ! Les tentatives d’ostracisme au gré des humeurs et successions de gouvernements, nous connaissons et nous avons toujours su les surmonter avec conviction et détermination !
La rentrée se fera.
Avec des personnels moroses qui en ont marre de ne plus rien comprendre au sens de leur métier. Les salles des profs se vident quand elles étaient pleines aux récréations dans les années 1990. Moins d’allant, moins d’entrain, une lassitude extrême du métier qui pousse chacun à venir faire ses heures de cours et à partir au plus vite tenter de retrouver une vie « normale ». Car ce que l’on vit dans nos lycées professionnels, ce n’est pas normal ! Les mots grandiloquents disent « perte de sens », « fatigue », « burn out », « pressions », « pas de soutien hiérarchique » … L’Éducation nationale est devenue une « grande muette ». Voilà la première hypocrisie ! On rase les murs en espérant que ni un proviseur ni une tuile ne nous tombe sur la tête. Et quand ça tombe sur quelqu’un d’autre, on fait profil bas, pas par lâcheté, non, mais par découragement et sentiment d’impuissance. Le SNETAA garde la tête haute, fier d’œuvrer au service des PLP. Et ça, oui, ça va encore gêner pour empêcher une impéritie gestionnaire accablante.
En parlant de « gestionnaires », nous saluons l’arrivée de nouveaux recteurs dans quelques académies ! La reprise en main politique semble d’actualité. Devons-nous nous en plaindre ? Les années à venir seront politiques ou ne seront pas ! Il faut du coffre, une colonne vertébrale solide et un cap pour relever le défi de l’Éducation nationale. Si « hypocrisies » il y a dans l’Éducation nationale, ce sont d’abord celles de responsables qui « gèrent à la mode techno ». Ceux à qui on demande un cap, des choix éclairés, du débat et de trancher dans le vif pour empêcher ceux qui nous ont mis dans cet état de continuer leur œuvre destructrice. À force de « gérer » et de mal gérer, les Français sont happés par les irruptions radicales qui n’ont jamais d’aboutissement favorable. Des émeutes – avec les mêmes jeunes à qui nous nous donnons sans compter – nous n’en avons pas en lycée professionnel. Par quel miracle ? Toujours par notre professionnalisme ! Mais à force de ne pas être entendu, le SNETAA annonce que l’enseignement professionnel est au bord du précipice : si l’on continue à tirer sur la corde, nous n’aurons pas la force d’arrêter les colères suscitées par les orientations à l’échec, la concentration de tous les problèmes de la société dans la même unité de lieu et sans moyens autres que des rustines illusoires.
D’une réforme, on en a besoin, on la demande, on la veut ! Pour des jeunes mieux orientés, pour des moyens à allouer en urgence, pour de nouveaux diplômes, pour que l’enseignement professionnel soit pleinement acteur d’une réindustrialisation sans quoi rien ne sera possible. En fait d’annonces, nous préférons des actes forts : d’abord être écoutés et entendus ! Avoir des directives simples, énoncées clairement pour un cap qu’on se fixerait en commun. Cela passe nécessairement par un diagnostic partagé. Est-ce encore possible ? L’avenir et ses événements « pas si imprévisibles que cela » nous le diront vite.
Farouchement indépendant de tout parti politique, on peut affirmer que, de ces politiques souvent issus de la Mairie de Paris ou de cabinets de conseil, on en a trop soupé de leur bilan désastreux que nous ne pouvons que subir. Paris n’est pas la France ! Le parisianisme exacerbé relègue la majeure partie des Français, comme de nos lycées professionnels de province, à la « périphérie » de tout. C’est un outrage pour la France qui se sent marginalisée, mise au ban de la Nation, sans bénéficier de l’essentiel : des écoles aux moyens à la hauteur qui donnent l’envie de s’agréger à la République, en pavant solidement l’avenir de ceux qui n’ont pas eu la chance d’être bien nés et des acteurs de santé qui assurent notre sécurité sanitaire au quotidien. C’est cela « l’ordre » a minima. Comme celui que nous réussissons chaque jour dans nos lycées professionnels sans aucun moyen supplémentaire pour prendre en charge dignement tous les élèves en rupture scolaire, en situation de handicap, les allophones, ceux qui ne croient plus ni en la République ni en leur avenir. Notre laïcité, que l’on ne sait plus comment transmettre, souffre d’avoir été remisée comme une offense depuis 30 ans. Au SNETAA, nous continuerons à la porter dans le cadre de notre mission de formation du futur citoyen au sein de nos lycées professionnels.
Rétablir l’autorité du maître ? D’abord reconnaître la primauté des décisions du conseil de classe et avoir un chef d’établissement toujours à nos côtés ! Refondre l’orientation pour que les résultats hyper-académiques du collège unique ne soient plus valeur d’orientation et d’échec. Des formations d’avenir ? Ouvrir des centaines de formations dans les métiers qui hurlent le manque de personnels : d’abord des diplômes dans les métiers du soin et de l’animation et en premier pour le grand âge, la dépendance, les métiers de l’artisanat, les métiers de l’industrie. De l’ambition, de l’excellence ? Donner les moyens d’augmenter la qualification des salariés de notre pays en formant des techniciens en nombre, en favorisant partout les mentions complémentaires (reconnues dans les conventions collectives), en inventant enfin un brevet professionnel supérieur à bac + 3. La philosophe Simone Weil rappelle que « le premier des principes pédagogiques, c’est que pour élever quelqu’un, enfant ou adulte [soit l’ensemble d’une société par extension], il faut d’abord l’élever à ses propres yeux ». Le mépris affiché envers un peuple, livré à un état de fractures, de divisions, de colères et d’incompréhension, le conditionne au choix des extrêmes. Le risque n’est pas accessoire…
Professeurs de lycée professionnel, le SNETAA reste à vos côtés et vous assurera toujours accompagnement et défense au quotidien. C’est notre raison d’être ! Vous pouvez compter sur les milliers de militants qui sont avec vous pour assurer le développement de l’enseignement professionnel initial, public et laïque et obtenir d’autres conditions de travail, d’autres conditions de salaire ! Le Président de la République se rendra dans un lycée professionnel à Orange (Vaucluse) pour la pré-rentrée des professeurs de lycée professionnel ce vendredi 1er septembre 2023. La section académique du SNETAA dans l’académie d’Aix-Marseille lui a demandé audience.
La rentrée se fera. Grâce à vous, grâce à nous. Mais vous devez être prêts pour poursuivre la lutte : nous pouvons, nous devons nous assurer un meilleur avenir ! C’est « l’ordre » de bataille pour cette nouvelle rentrée !
Bonne rentrée.
NB : chaque jour des militants répondent à vos appels de 9h à 18h. Ils sont spécialisés dans vos droits spécifiques, accompagnés d’une psychologue clinicienne, de spécialistes du handicap (pour soi et pour les jeunes avec besoins particuliers dont vous êtes chargés), d’un CPE pour les questions liées à la vie scolaire, de chefs de travaux et de pédagogues très au fait des programmes pour tous les PLP et CPE, au premier rang desquels se trouvent les stagiaires. Disponibles pour tous nos adhérents, n’hésitez pas à faire appel à eux au 01 53 58 00 30 ainsi que vos équipes académiques (coordonnées dans l’agenda SNETAA).